Vivre solo c’est aussi le bonheur de laisser libre cours à ses passions, sans craindre de se faire reprocher d’en mettre trop, d’être trop intense. J’ai la caractéristique d’être effectivement très investie dans mes passions. Depuis 13 ans, le groupe montréalais Half Moon Run occupe la majeure partie de mon espace musical.
À 61 ans, j’assume pleinement mon statut de groupie, et de fan finie. Les gars du band pourraient même vous le confirmer 😉. Non, y a rien de « creepy » là-dedans. Ces gars-là ont l’âge d’être mes fils, alors on se calme. Oui, ils sont adorablement beaux, mais c’est leur intelligence et leur sensibilité musicale qui me rendent folle d’eux.
Vous comprendrez donc que je fais augmenter la moyenne d’âge de l’assistance quand je vais les voir en concert…
Un certain après-midi au bureau, en février 2013, mon oreille a été attirée par la sonorité particulière de la guitare qui sortait faiblement de mon petit poste de radio. J’ai monté le volume dans la limite imposée par la proximité de mes voisins de bureau. J’ai été parcourue d’un frisson inexplicable…c’était ma première rencontre avec Full Circle. Le soir même, j’achetais la chanson en ligne, et après dix écoutes successives, j’achetais l’album Dark Eyes. À partir de là, je crois que je peux compter en milliers le nombre de fois qu’il a joué en boucle dans mes écouteurs, dans ma voiture, dans mon haut-parleur chez moi.
Il est difficile de vous expliquer l’effet que la musique de Half Moon Run a eu sur moi, dès la première écoute. Disons que c’est comme si j’avais attendu cette musique depuis toujours, comme si je la «reconnaissais ». Comme une âme sœur musicale, tiens!
Le band jouait dans un petit bar de Sorel, le Marine Cabaret, quelques jours après ma délicieuse découverte. Je m’y suis rendue avec une amie. On était moins d’une centaine de personnes dans la place. L’impression de vivre un moment privilégié et annonciateur de quelque chose de plus grand est vite devenue évidente. J’ai eu des larmes incontrôlables tout du long, j’étais transportée dans une haute vibration par cette musique et ces harmonies vocales qui m’envoûtaient, carrément. Le pouvoir de la musique que je venais de découvrir deux semaines plus tôt devenait encore plus puissant,« live » devant moi.
Après le spectacle, je suis restée pour parler aux membres du band. J’ai jasé un bon moment avec un Dylan super sympathique, qui me fascinait avec son clavier sur son bass-drum. J’ai aussi pu aller saluer Devon et Conner dans la loge. Des jeunes hommes brillants et accueillants, avec lesquels j'allais avoir plusieurs autres belles rencontres.
Le lendemain, je prenais seule la route glacée en pleine tempête pour aller les revoir au Théâtre Granada, à Sherbrooke. C’était la première fois que je n’avais cherché personne pour m’accompagner à aller voir un show. J’avais juste besoin de m’envelopper d’Half Moon Run, sans rien avoir à expliquer à personne.
Jamais de ma vie je n’avais ressenti une aussi profonde connexion avec la musique d’un groupe. J’avais bien été obsédée par Genesis dans mon adolescence, mais ça n’avait rien à voir. Évidemment, la vie avait depuis apporté des préoccupations « d’adulte » et des émotions reliées à certaines épreuves particulièrement souffrantes.
Half Moon Run était arrivé dans ma vie en pleine tempête, au milieu d’une de ces épreuves. Sans entrer dans les détails, je peux seulement affirmer que la musique d’Half Moon Run a servi de ciment pour recoller des pans importants de ma vie personnelle et familiale, qui était en train d’éclater en morceaux.
À ce jour, je ne comprends toujours pas comment ces jeunes musiciens peuvent si bien traduire mes états d’âme de cinquantenaire/sexagénaire. Assurément, ce sont de vieilles âmes…
J’ai contaminé mes deux garçons avec ma passion. Ils n’ont pas été difficiles à convaincre. Mon plus jeune m’a accompagnée 11 fois sur les 21 shows auxquels j’ai assisté. Lui et moi avons eu le privilège de rencontrer les membres du groupe plusieurs fois. Mon aîné s’est joint à nous pour quelques shows plus tard. Bien sûr, je payais leurs billets, mais on s’en fout! On trippait !! Ces soirées avec mes deux trésors auront été des moments privilégiés, que je chéris encore maintenant qu’ils sont adultes.
Malgré ça, je me prenais à envier les couples que je voyais autour de moi. J’aurais souhaité pouvoir écouter cette musique, collée sur mon amoureux.
Mes garçons ont éventuellement continué à aller voir le band avec leurs amis, et c’est bien ainsi. Il n’y avait toujours pas d’amoureux dans mes alentours. Encore solo, pour le meilleur et pour le pire…
J’ai choisi d’aller voir certains shows seule. C’était ok, j’étais bien. Mieux encore, je me trouvais quand même bonne, à mon âge, de me rendre voir un show seule au Théâtre Corona, par exemple. Ou cette fois où j’ai pris congé de mon travail en plein milieu de semaine pour aller les voir au Festival d’Été de Québec, en 2016. J’ai passé la soirée près d’un groupe de jeunes filles qui m’offraient un joint et qui me trouvaient« hot » pour une « madame ».
Moi, je me sentais juste… vivante.
En décembre 2023, un appel à tous les fans du Québec a été lancé par le band sur leurs réseaux sociaux : leur photographe officielle était à la recherche des plus solides fans québécois, pour un documentaire. Il fallait simplement écrire un texte expliquant pourquoi on méritait de faire partie de ce groupe select… Évidemment, les membres du band me connaissant, j’ai été choisie. Je me sens privilégiée d’avoir pu participer à l’enregistrement de ce documentaire, avec une vingtaine d’autres fans finis comme moi. Sortie prévue bientôt…. J’ai hâte!!
En mai prochain, je serai assise devant la scène à la Maison Symphonique, pour mon 22e spectacle d’Half Moon Run…. Et croyez-moi, j’ai hâte comme à mon premier show.
Merci Dylan, Conner et Devon, de me faire vivre d'aussi intenses émotions.
